Poèmes de ‘Atopos erotes’

Histoire d’un meurtre raté

Sunday, May 30th, 2010

Histoire d’un meurtre raté

Mettre un monde entre toi et moi
Ne suffirait pas
L’espace ne sert à rien
Nous sommes sans limites

Mon amour
Ta haine
C’est une guerre
Enfermée dans un homme.

C’est l’histoire ordinaire
De la violence humaine
C’est une course de mammouths
Depuis la première nuit
Des premiers amants

C’est une tragédie
Ou une fresque historique.

On a tant ri, pourtant
On a tant fait l’amour
Que tu défaisais avec minutie
Défait jusqu’au lit, jusqu’au délire

Notre amour si grand
Dont seule j’avais le cran
C’est toi qui le dis.

Tu étais romantique
Le lundi
Lunatique le mardi

Et violent tout le temps

Tu avais tué le temps
Tu étais la mort et la vie à la fois
Tu étais violence en soi

La violence fondamentale-
ment stupide et vide
Et je suis partie

Pour la vie.

Mai 2010

Renaissance

Sunday, May 30th, 2010

Renaissance

Je suis heureuse sans toi
Le manque est une peau de chagrin
Je m’étire dans l’espace sans fin
Je me roule dans la liberté
Je respire à pleins poumons
Se sentir vivre, que c’est bon !
Et quand je me sens seule
Ton absence me console
La vie emporte nos baisers
Ah enfin, je renais !

Le 23 mai 2010

Travail de deuil (à temps plein)

Sunday, May 30th, 2010

Travail de deuil (à temps plein)

Je ne pense pas à toi
Je ne rêve pas de toi
Je ne fantasme pas sur toi
Je ne parle pas de toi
Je ne me demande pas ce que tu fais
Qui tu vois, qui tu baises
Je ne te vois pas partout
Je ne te compare pas
Je n’entends pas ta voix
Tu ne me manques pas
Je n’ai pas envie de te voir
Je n’ai pas envie de toi
Je ne t’aime pas
Je t’oublie
Je t’oublie
Je t’oublie
Tout le temps.

Mai 2010

Ce qui reste

Sunday, May 30th, 2010

Ce qui reste

Après la colère, il reste
Le chagrin
Après l’étreinte, il reste
L’empreinte
Et après l’amour fou
Il ne reste rien.

Le 22 mars 2010

Rupture

Monday, March 15th, 2010

Rupture

Je me suis dit…

Que j’allais sortir
M’arracher à ce marasme
Aller faire le trottoir
Jusqu’à m’user les godasses

Que j’allais bien finir par mourir
Puisque notre amour n’est plus
Et que le sens a perdu

Je me suis dit…

Que j’allais m’arracher les dents
Une à une
Pour tuer le temps
Pour chaque jour où j’ai mal
Comme on achève Sardanapale

Et quatre à quatre
Gravir les marches
De l’escalier descendu
Et faire les comptes
De ce qui ne marche plus

Aimerai-je encore après le meilleur ?
Non.
Ai-je survécu au pire ?
Non plus !

Alors je crève de honte
Je me retrouve nue
Je me pince fort

Mais heureusement têtue
Je dis…

« Notre amour n’est plus
Vive la mort ! »

Montrouge, mars 2010

Eros fatum

Sunday, September 20th, 2009

Eros fatum

Brutalisée par le dégoût
Qu’imprègne en moi l’idée d’une mort
Inachevante
Je sers des lendemains de déroute
De désespoir me serrant à la gorge
A l’aube exaltante
L’air encore chaud de notre agape
Sent l’irrémédiable qui vient
Ce qui n’est pas advenu est aussi
Ce qui nous emporte
Cher amant et amour, inexorable étranger
Ferme donc les yeux sur cette fatalité
Et derrière toi la porte.

Décembre 2008

Apnée

Sunday, September 20th, 2009

Apnée

Je m’enferme dans ma poitrine
Je coffre mon souffle, clos mes yeux
Plonge au sein de l’aqueuse machine
Nage, creuse dans l’eau bleue
Je crache mon amour tuberculeux
Je râle, je vocifère
Dans le ventre de cet artefact de mer
M’époumone jusqu’à la dopamine
Jusqu’à devenir un poisson
Hier je te taillais encore la pine
Ce matin tout est déréliction
Tu m’as abandonnée, recalée
Et je m’étourdis de plus bel
Hier encore tu mangeais ma cyprine
Ce matin j’avale la trace des autres dans cette piscine
Je leur appartiens de nouveau, sirène au milieu des veaux
Si malheureuse, si soulagée
Enfin la grande apnée.

Juillet 2008

Les animaux ne l’ont pas

Sunday, September 20th, 2009

Les animaux ne l’ont pas

Je n’ai pas trente ans
Et je me sens déjà mourir
Je croyais poursuivre la mort, mais en réalité
Je baignais dans l’illusion de l’immortalité.
Vingt-huit ans. Je t’ai rencontré.
Tu as redéfini l’avant
Tu as brandi l’après.
En tuant l’enfant
Tu as généré la globalité
Je n’étais qu’un commencement
Dans tes yeux j’ai pris forme
Tu m’as délimitée.
Je vais mourir
Maintenant je le sais
Il n’y aura plus rien d’innocent jamais.
Les minutes mises à nu
Ont sorti leurs outils
Elles ne se fardent plus d’innocuité.
J’ai peur d’elles
Et plus de peine à vivre
Les jours et les choix sont moins faciles
Quand on sait le déterminant et le limité.
Paradoxe insoluble de l’humaine destinée
Je peux agir sur tout, même sur les conditions de ma propre fin
Je peux la programmer, me l’infliger, voire la repousser
Mais je ne peux pas y échapper.
Peut-être faut-il vouloir mourir avec quelqu’un
Pour prendre conscience de sa propre mort
Darwin aurait donc tort.

Juillet 2008

Octobre ascendant

Sunday, September 20th, 2009

Octobre ascendant

Assise aux pieds d’un mur profond
Sur le cul d’un wagon ligne B
Je prends le ciel en considération
Bleu enfin c’est le mois de février

Claque géante de l’azur
Sur ma figure démesurée
Comme une caresse combien violente
Lumière éjaculée

J’imagine…

Indolente épure :
Sur une pierre brûlante
Un corps de sylphe nu
Sur la grève gisant
Offerte aux marées
Elle prélasse sa nubilité

L’inventant, c’est pour la dévorer
Et t’en affamer
Je rentre aux pores
De l’ingénue
Et toi tu viens jeter l’ancre
Dans mon cul.

Février 2008

Poésie des trains

Sunday, September 20th, 2009

Poésie des trains

Dans ce paysage qui défile
Tu es l’élément persistant
Comme une impression de jaune à midi
De vieux rose au couchant
Tu impressionnes chaque cellule de mes yeux
Chaque horizon au fond de ma rétine
Ouvre sur nous deux
L’espace n’a de limite que notre corps à corps prochain
Chaque heure d’autre but que sa propre fin
Je ne peux plus lire d’autres mots
Que ceux que nous écrivons
Tous les autres sont vains
Puisque vides de notre amour
Une pensée point de loin en loin
Tout ce qui n’est pas Nous est passé
Tout ce qui est Nous est toujours.

Octobre 2007