Arbre fruitier
Monday, August 6th, 2012Arbre fruitier
Bébéyer
Donne-moi tes fruits sucrés :
Bébé secoué
Bébé volé
Bébé noyé
Bébé excisé
Bébé violé
Bébé abandonné
Bébé étouffé.
Arbre fruitier
Bébéyer
Donne-moi tes fruits sucrés :
Bébé secoué
Bébé volé
Bébé noyé
Bébé excisé
Bébé violé
Bébé abandonné
Bébé étouffé.
Intégrité corporelle
Benoa est dans mon bras
Mandi est dans ma narine
François est dans mon estomac
Chris est dans ma cuisse
Amande est dans ma jambe
Milo est dans mon dos
Camille est dans ma cheville
Stéphane est dans mon crâne
Marion est dans mon poumon
Jérémie est dans mon sourcil
Jef est dans ma fesse
Mireille est dans mon oreille
Laroussi est dans ma vessie
Dorothée est dans mon nez
Claire est dans ma glaire
Elé est dans mon pied
Mikaël est dans mon aisselle
Raf est dans ma rate
Béatrice est dans mon clitoris
Paco est dans ma peau
Danielle est dans ma moelle
Carole est dans mon aréole
Emilie est dans mon rachis
Marie-Laure est dans mes pores
Audrey est dans mon cervelet
Ivan est dans tous mes organes.
La colère des enfants
Il y a des doigts coupés
Des doigts de mains, des doigts de pieds
Il y a des petits doigts partout
Dans les forêts, les bosquets, les prés
Au bout des branches
Des bouts de doigts se balancent
Dans les allées, les futaies, les récrés
Dansent des doigts coupés
Partout les enfants jouent
Partout ils rient encore
Leurs rires sont entiers
Leurs dents sont en or
Leur colère dort
(Elle va se réveiller).
Dédé m’a dit
Je voudrais vous présenter
Mon pote Dédé
C’est le dernier né
De mes amis abstraits
Des mots mis bout à bout
Qui raccordent tout
Dédé les écrit pour moi
Allongée dans l’herbe au soleil
Il me les susurrent
Vous ne l’entendez pas ?
Des mots attachants
Pour recoudre le sens
D’une déchirante existence
Un destin navrant
Cousu de fil noir
Quand je perds le nord
C’est la vie d’abord
C’est l’amour d’abord
Car un livre n’est rien
Dédé le dit bien
Brûlez les mots et réchauffez-vous !
Hauts les cœurs et les culs !
Les idées, au billot !
Et maintenant : l’aventure.
Mai 2010
Histoire d’un meurtre raté
Mettre un monde entre toi et moi
Ne suffirait pas
L’espace ne sert à rien
Nous sommes sans limites
Mon amour
Ta haine
C’est une guerre
Enfermée dans un homme.
C’est l’histoire ordinaire
De la violence humaine
C’est une course de mammouths
Depuis la première nuit
Des premiers amants
C’est une tragédie
Ou une fresque historique.
On a tant ri, pourtant
On a tant fait l’amour
Que tu défaisais avec minutie
Défait jusqu’au lit, jusqu’au délire
Notre amour si grand
Dont seule j’avais le cran
C’est toi qui le dis.
Tu étais romantique
Le lundi
Lunatique le mardi
Et violent tout le temps
Tu avais tué le temps
Tu étais la mort et la vie à la fois
Tu étais violence en soi
La violence fondamentale-
ment stupide et vide
Et je suis partie
Pour la vie.
Mai 2010
Renaissance
Je suis heureuse sans toi
Le manque est une peau de chagrin
Je m’étire dans l’espace sans fin
Je me roule dans la liberté
Je respire à pleins poumons
Se sentir vivre, que c’est bon !
Et quand je me sens seule
Ton absence me console
La vie emporte nos baisers
Ah enfin, je renais !
Le 23 mai 2010
Travail de deuil (à temps plein)
Je ne pense pas à toi
Je ne rêve pas de toi
Je ne fantasme pas sur toi
Je ne parle pas de toi
Je ne me demande pas ce que tu fais
Qui tu vois, qui tu baises
Je ne te vois pas partout
Je ne te compare pas
Je n’entends pas ta voix
Tu ne me manques pas
Je n’ai pas envie de te voir
Je n’ai pas envie de toi
Je ne t’aime pas
Je t’oublie
Je t’oublie
Je t’oublie
Tout le temps.
Mai 2010
Ce qui reste
Après la colère, il reste
Le chagrin
Après l’étreinte, il reste
L’empreinte
Et après l’amour fou
Il ne reste rien.
Le 22 mars 2010
L’ogresse dedans
Un ciel de bronze
Écrase un horizon de jonquilles
Comme autant de têtes blondes
Dans mon champ de vision
Insolemment jaune
Je frise l’insolation
Un corps étranger bouge à l’intérieur
C’est un monstre qui me dévore le cœur
Une ogresse dodue en dedans
Une créature affamée infâme
Qui bouffe les hommes et les femmes
Dans l’antichambre du vivant
Où naît l’inspiration
C’est le garde-manger des enfants
Leur insatiable énervement
La jouissance éhontée
De ceux qui ne grandiront jamais
O joyeuse masturbation !
Cette amoureuse a huit ans
Depuis le début des temps
Elle réinvente l’amour
Depuis le premier jour
De l’imagination.
Mai 2010
Le violon
Sur une ligne de métro aérien
On s’envole parfois
On monte à bord d’un violon gitan
On voyage dans le temps
Le jeune couple tzigane
Monte dans la rame, on embarque
Lui tient son instrument à cordes
Elle frappe sur le tambourin
On dirait une excroissance de main
Un virtuose organe
On dirait la joie et l’espoir humains
Mais c’est un drame
Tout s’accorde dans leurs yeux
Le silence craque et s’ouvre sous nos pieds
Un trou noir de liberté qui rend braque
Un chaos dans nos têtes merveilleux
Son violon raconte la fin
Au rythme effréné des stations
Et leur idylle conte un monde
Au tragique refrain.
Mars 2010